Article publié dans l’Humanité – novembre 1997 – Claude Cabannes.
Les communistes de ma génération doivent beaucoup à Georges Marchais. Je lui dois beaucoup.
Et particulièrement d’avoir découvert, dans le sillage de sa personnalité, le monde ouvrier.
Dans les années 60-70, jeune homme débarqué du fin fond de la Gascogne, avec pour seul viatique la toute fraîche carte du Parti, j’ai rencontré du côté du Val-de-Marne un univers qui m’était inconnu, celui des hommes des usines.
Georges Marchais a incarné pour moi ce nouveau monde, dont l’esprit de combat et la bouleversante fraternité m’ont révélé une sorte d’autre moi-même que je ne connaissais pas. J’en ai été définitivement changé.
Il m’a aussi appris l’art du verbe en mouvement. Au cours d’un incroyable meeting électoral, il était venu soutenir le candidat communiste aux élections législatives de la huitième circonscription du Val-de-marne et avait invité son adversaire de la droite à cette soirée. Lequel était venu avec ses amis. Il ne l’a sans doute jamais oublié. Moi non plus, qui étais le bien timide secrétaire de la section du coin. En quelques mots, Georges Marchais a mis un terme à l’état de guerre vociférante de la salle, pour imposer une véritable confrontation sereine des points de vue. Il y fit merveille. J’ai appris de cet épisode la formidable jubilation qui naît de l’affrontement de ses propres idées avec celles des autres. Cela aussi m’a changé pour toujours.
Claude Cabannes.